Le jury du Prix de thèse sur le Moyen-Orient et les mondes musulmans 2022 du Groupement d’Intérêt Scientifique (GIS) Moyen-Orient et mondes musulmans et de l’Institut d’étude de l’Islam et des sociétés du monde musulman (IISMM) a désigné les lauréats pour cette année.
À la suite de l’évaluation des 82 candidatures reçues et des délibérations du jury, plusieurs prix thématiques ont été décernés, parmi lesquels « Le prix de la thèse francophone soutenu par l’AUF Moyen-Orient ». Ce dernier a été décerné à Mohammed Sharqawi et Waed Bouhassoun, chercheuse mais aussi compositrice, chanteuse et joueuse de oud syrienne qui mène une brillante carrière artistique internationale en parallèle à ses travaux de recherche.
Nous l'avons rencontrée.
En quoi consiste votre projet de recherche ?
Ma recherche en ethnomusicologie porte sur les expressions vocales féminines de lamentation durant les rituels funéraires des Druzes du sud de la Syrie. Je montre le rôle majeur, dans le rituel ordinaire, des femmes qui, avec ces pratiques vocales et musicales, théâtralisent l’expression de la douleur et donnent un sens collectif à la mort, au nom de toute la société. Je m’attache surtout à décrire et analyser les pratiques sonores et musicales, seuls supports de la mémoire collective des défunts. Dans les funérailles d’un jeune martyr (depuis 2011), ce sont plutôt les hommes qui prennent en charge les expressions poétiques, chantées et dansées (la jawfiyya). Les expressions orales et musicales dans les rituels funéraires permettent à la communauté de tisser de nouveaux liens en son sein et à l’extérieur en incluant les vivants et les morts, et en départageant les rôles entre les hommes et les femmes.
Encouragez-vous les étudiants du Moyen-Orient à s’investir dans le domaine de la recherche ?
Bien sûr, et pour plusieurs raisons. La recherche scientifique nous permet de connaître l’autre qui se trouve en chacun. Dans le contexte actuel, la recherche comme l’art est l’un des seuls moyens de dialoguer avec l’autre sans le juger. Faire de la recherche, c’est aussi se plonger dans les travaux des autres chercheurs pour s’inspirer, pour voir et déterminer ce qui fait la particularité de sa propre recherche. Travailler sur sa propre société peut représenter un défi, parce qu’au-delà de l’avantage de connaître les gens et la langue en amont, il est parfois difficile de mettre de la distance avec son terrain. La recherche scientifique offre une boîte à outils pour pouvoir aborder sa propre société.
Comment avez-vous entendu parler du Prix de Thèse et pourquoi avez-vous postulé ?
Je suis abonnée à la newsletter du GIS Moyen-Orient et j’ai reçu l’appel par ce biais. J’ai postulé, pas seulement pour le prix de thèse, mais parce que c’était une manière pour moi de faire connaître mon travail aux autres. Et aussi d’élargir mon réseau, mes relations, pour pouvoir échanger avec d’autres chercheurs sur des sujets qui nous intéressent.
Connaissiez-vous l’AUF ? Que pensez-vous de son rôle dans l’appui à la recherche ?
Je connaissais l’AUF. Je pense que son rôle d’intermédiaire entre les chercheurs ici et le Moyen-Orient est primordial. Cet organisme facilite le travail des chercheurs qui partent au Moyen-Orient et les aide sur place. Il facilite et encourage le travail des chercheurs, et assure aussi un suivi.