Rencontre avec Danielle Pailler, Directrice régionale de l’AUF au Maghreb

Danielle Pailler est la Directrice régionale de l'AUF Maghreb depuis le 1er septembre 2020. Elle a récemment reçu le grade de chevalier de l’Ordre National du mérite délivré par le Premier Ministre Français, Jean Castex. A l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes nous l'avons rencontrée.

  • Quelles sont vos missions à l’AUF ?

Occuper depuis le 1er septembre 2020 la fonction de directrice régionale de l’AUF Maghreb représente un aboutissement, un point de convergence d’engagements passés, porteurs d’un sens commun que je continue à défendre au sein de cette nouvelle séquence professionnelle. En effet, la relecture de mon parcours professionnel permet d’en identifier une quête, une colonne vertébrale faite des valeurs qui se sont progressivement imposées à moi.

Débutant ma carrière professionnelle avec l’exercice de fonctions managériales dans une grande entreprise multinationale, j’ai choisi trois ans plus tard de quitter ce premier emploi qui ne m’apparaissait pas suffisamment en phase avec des principes humains à mes yeux essentiels. Je me suis ensuite engagée en tant que consultante en management dans une agence de communication. Ces dix premières années d’expériences professionnelles ont exacerbé le besoin de revenir au fondamental, les connaissances. Soutenir l’année suivante un Diplôme d’Étude Approfondie en sociologie m’a encouragé à poursuivre en doctorat en sciences de gestion, les sciences de l’action ! Je vivais dans le même temps mes premières expériences d’enseignement, en me positionnant déjà dans un rôle de « facilitateur ». Devenue Maître de Conférences et Habilitée à Diriger des Recherches au sein de l’Université de Nantes (France), la sollicitation pour occuper durant deux mandats le poste de Vice-Présidente en charge de la Culture m’a permis durant 10 années, à partir de 1997, d’appréhender les enjeux de gouvernance universitaire. J’ai aussi pu dans ce contexte, m’engager à partir des valeurs que je défendais dans mes activités de recherche appliquée : l’art et la culture comme espaces de créations de valeur plurielles (économiques, relationnelles, sociales, territoriales,…). Créer ensemble pour générer de la paix ! Durant toutes ces années d’engagements académiques (responsabilités de masters, publication de nombreux articles et ouvrages, conférences internationales, notamment sur la citoyenneté culturelle,…), je montais dans le même temps des projets internationaux notamment entre la France et le Maghreb. J’exerçais aussi des missions d’expertise internationales par exemple pour les Instituts Français dans différents pays (États-Unis, Vietnam,…) : défendre la francophonie ouverte était déjà une nécessité !

Ainsi, prolonger aujourd’hui ces engagements au sein de l’AUF Maghreb s’avère être cohérent, puisqu’il m’est confié la responsabilité de décliner au Maghreb la stratégie mondiale de l’AUF. Il s’agit donc de répondre aux besoins des pays et pour cela, de concevoir et de mettre en œuvre un projet scientifique à impact social dans ses composantes de managements interne et externe. Sa finalité fait sens pour moi puisqu’il s’agit d’agir pour que les jeunes puissent, notamment depuis nos universités membres, se créer un avenir empreint de dignité et de valoriser leurs ressources. Pour que chacun(e) trouve sa place notamment à partir de son potentiel créatif ! Et je m’engage donc avec enthousiasme depuis une francophonie pluri-linguiste, ancrée dans la diversité culturelle, résiliente, innovante, ouverte sur les défis du monde depuis des enjeux de connaissance !

  • Vous venez de recevoir le grade de chevalier de l’Ordre National du mérite délivré par le Premier Ministre Français, Jean Castex. Que représente cette distinction pour vous ? 

Je dédie cette distinction à toutes les personnes qui ont permis la mise en œuvre d’actions de « reliances » (relier la culture et les personnes qui s’en estiment éloignées, relier des institutions et leurs publics, relier des territoires pour générer des synergies,…), car naturellement, rien ne se fait seul(e) ! Est reconnu à travers cette distinction la force de l’action persévérante. En effet, je suis honorée que soit ainsi soulignée l’utilité d’actions qui ont eu pour vocation, là encore, de permettre à chacun, chacune de prendre sa place, notamment pour des personnes en situation de précarité, notamment en agissant depuis des quartiers « populaires ». Des actions portées par une vision, une ambition de « mieux faire humanité ensemble ». Nous n’avons pas le choix ! Et le sens généré par ces engagements donne de la force pour toujours continuer à agir, tenter, apprendre, convaincre institutions et acteurs politiques avec lesquels je suis en réseau. Les convaincre par exemple du rôle des droits culturels des personnes : reconnaitre que chacun, chacune est porteur d’une culture endogène. Si cela parait simple à énoncer, lorsque cela doit se traduire par des choix politiques et financiers, porter cette vision demande beaucoup de persévérance ! Créer des expérimentations internationales, publier, animer des séminaires sur ces enjeux m’a donné foi en l’avenir, notamment quand il se conjugue au féminin !

  • En cette journée du 8 mars, quels messages souhaitez-vous adresser aux jeunes femmes qui débutent leurs carrières dans un établissement d’enseignement supérieur ? 

C’est en tant que femme, professionnelle et maman que j’ai abordé ma carrière universitaire : c’en était une seconde étape, un second souffle après 10 ans dans le monde de l’entreprise. Arriver à composer un équilibre entre les différentes facettes de nos vies de femme nécessite une subtile et profonde clairvoyance de nos besoins. Les écouter doit nous permettre, pas à pas, de créer nos vies pour que ces différentes dimensions d’expression et d’engagement social se combinent. Si le monde universitaire se caractérise par la noblesse de ses enjeux de création et de diffusion de connaissances, la réalité de l’exercice quotidien de ces métiers nécessite pour nous femmes, une conscience aigüe, de ce qui fonde/ fait le féminin, avec nos propres ressources, manières d’être pour répondre à d’éventuels rapports de force ! C’est ce qui nous permet de trouver notre place, de générer de la confiance pour pouvoir agir en loyauté vis-à-vis de nos institutions tout en défendant nos convictions : c’est ce qui donne la force de la persévérance, nourrit la vitalité pour encore et toujours s’engager, y compris dans des moments complexes comme ceux que nous traversons aujourd’hui, avec leur nécessaire résilience. En somme, croyez en vos ressources propres, singulières : c’est en y étant reliées que nous serons des actrices de transformation, en complicité et complémentarité, et non contre ceux avec lesquels il est nécessaire d’interagir ! C’est riches de nos compétences (notamment communicationnelles et comportementales) que nous serons reliées à notre élan vital et créatif…

Date de publication : 06/03/2021

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