Entretien avec Marie Langevin, codirectrice à l’Observatoire francophone pour le développement inclusif par le genre (OFDIG)
Marie Langevin, École des sciences de la gestion, Université du Québec à Montréal, Québec, Canada
Quelle contribution souhaitez-vous apporter à l’Observatoire sur le plan de la recherche?
Mes recherches se situent dans les champs de l’économie politique et des études critiques de développement. Dans mes travaux au sein de l’OFDIG, je souhaite développer des outils qui nous aideront, aux plans scientifique et social, à mieux comprendre les dynamiques de développement inclusif. Je souhaite apporter un regard critique afin de problématiser les structures politiques de l’économie (accès, distribution des ressources, règles et fonctionnement des organisations et des marchés), d’analyser leurs dimensions genrées et de décortiquer les relations entre les organisations et la (re)production d’inégalités.
Selon vous, quels sont les principaux enjeux auxquels sont confrontées les femmes tant dans le milieu de l’enseignement supérieur et de la recherche, que les systèmes éducatifs et le secteur de l’économie?
J’estime que les principaux enjeux se situent au plan systémique. Pour le dire simplement, dans les règles du jeu qui sous-tendent le fonctionnement de nos institutions, en éducation, en recherche, comme en économie et qui trop souvent nuisent à la pleine participation des femmes dans ces sphères. Si nous pouvons rendre visibles les inégalités femmes-hommes avec des indicateurs qui prennent en compte leurs dimensions systémiques, nous serons mieux équipé.e.s pour analyser les mécanismes d’accès aux opportunités socio-économiques pour les femmes et les filles et leur participation aux processus de création et de distribution des richesses. Les dimensions invisibilisées du développement inclusif sont en effet nombreuses. Pensons à la triple journée des femmes (famille, travail, service à la communauté ou care) qui échappe, notamment, aux politiques d’embauche des employeurs ou de promotion dans les différents milieux, à la proportion de femmes dans les postes de responsabilités dans les universités, ou aux lacunes de financement pour les femmes en recherche. Pensons également aux contributions méconnues des femmes aux économies solidaires, sociales et de proximité; aux effets négligés des violences de genre sur la participation des femmes et des filles aux secteurs clés du développement inclusif…
Quel sera l’impact souhaité de l’OFDIG à moyen ou long terme sur le développement inclusif par le genre dans dans la Francophonie?
À l’échelle de la Francophonie, l’OFDIG deviendra la référence sur le développement inclusif par le genre. Grâce à nos travaux interdisciplinaires et critiques ancrés à l’international, nous produirons un ensemble des connaissances solides pour l’étude du développement inclusif par le genre, comprenant un corpus d’approches à utiliser, de données à diffuser et de pratiques à déployer. Nous construirons un savoir rendant visibles les bonnes pratiques existantes en faveur d’un développement plus inclusif pour les femmes et les filles, en documentant les initiatives inclusives visant la réduction des inégalités FH, notamment celles par et pour les femmes qui visent leur agentivité et leur participation à différents domaines en portant une attention particulière aux systèmes universitaires, éducatifs et économiques. Aborder la problématique des inégalités femmes-hommes avec plus de détermination dans la prochaine décennie permettra d’accélérer les efforts déployés pour atteindre les Objectifs de développement durable (ODD), notamment en soutenant les rôles des femmes dans les différents secteurs et à tous les niveaux de la société.
En cette Journée internationale des femmes, quel message souhaiteriez-vous adresser aux filles qui débutent leur parcours professionnel?
Je souhaiterais les encourager à choisir l’avenue qui correspond le mieux à leurs aspirations et non pas aux attentes sociétales à leur égard. Je les encourage à laisser derrière elles le sentiment d’imposteur qui nous taraude encore trop souvent et à s’entourer d’allié.es, de complices et de mentor.es pour mieux surmonter les défis et progresser vers leur entière participation aux opportunités de développement inclusif.
Portrait de à l’OFDIG :
Caterine Bourasse-Dansereau : chercheuse engagée dans une approche participative, partenariale et féministe (Québec, Canada)