Dans le cadre des Projets de coopération scientifique inter-universitaire (PCSI), la chercheuse Claude Daou de l'Université Libanaise a bénéficié d'un soutien de l'AUF pour faire avancer ses recherches portant sur la présence dans les milieux aquatiques naturels et les effluents de station de traitement des eaux usées, de produits pharmaceutiques (PPs) qui constituent l’une des pollutions environnementales majeures actuelles . Nous l'avons rencontrée.
- En quoi consiste votre projet de recherche ?
Notre projet s’est effectué à l’Université Libanaise en partenariat avec l’Université Aix-Marseille, France et l’Université Cadi-Ayyad, Maroc. Afin de limiter les pollutions des milieux aquatiques, ce projet se focalise sur l’utilisation de nouvelles technologies de traitement telles que des procédés d’oxydation avancée (POAs) et d’absorption sur charbon actif biosourcé. Le charbon actif utilisé provient de la valorisation des déchets végétaux d’origine marocaine. Ces déchets sont transformés afin d’obtenir le charbon activé qui pourra être formulé avec du dioxyde de titane pour obtenir un nouveau photocatalyseur composite. Des études cinétiques ont été entreprises afin d’éliminer efficacement les PPs.
Par la suite, le travail s’est intéressé à l’évaluation de l’impact environnemental du contenu chimique résiduel de l’eau après les différents traitements effectués. Cette étude s’est appuyée sur la mesure de l’activité microbiologique (Pseudomonas aeruginosa) et le développement biologique (embryons de poisson zèbre) en fonction de l’avancement du traitement appliqué afin d’apprécier son innocuité. Ces résultats devraient permettre de mesurer l’impact potentiel de la technologie de traitement sur le compartiment récepteur et de sélectionner la technologie la plus efficace et la moins impactante d’un point de vue environnemental.
- Quels sont les résultats obtenus jusqu’à présent ?
L’élimination de DCF et de ses sous-produits de dégradation, par photocatalyse en présence de 10% de charbon actif biotinylé (CAP/TiO2) s’avère une solution prometteuse pour l’environnement. D’un côté, l’utilisation du charbon actif biotinylé servira à la gestion durable de l’environnement tout en permettant de valoriser les déchets solides tels les coques de graine d’origine marocaine dans notre cas. Nous pourrions dans des études ultérieures, utiliser des déchets solides d’origine libanaise tels les coques de noix. D’un autre côté, le développement de telle méthode de traitement pratique et peu coûteuse serait indéniablement utile pour des pays souffrant d’une politique des acteurs publics et/ou des moyens financiers inadaptés pour le traitement de l’eau en général. Concernant l’approche toxicologique de ce traitement, plusieurs observations sont à souligner, principalement : la photocatalyse s’est avérée plus efficace à diminuer la toxicité du DCF sur les embryons de poisson zèbre que la photolyse. Pseudomonas aeruginosa s’est montré capable d’éliminer la toxicité de DCF traité par photocatalyse après 2h et 4h d’irradiation en raison de sa faible concentration dans le milieu (aucune malformation n’est détectée sur les embryons du poisson exposé à ses solutions). Ceci montre que notre système fonctionne très bien.
- Comment avez-vous entendu parler de l’AUF et pourquoi vous êtes-vous tournés vers l’agence ?
J’ai connu l’AUF il y a presque vingt ans, quand j’étais encore étudiante à la faculté des Sciences de l’Université Libanaise. L’AUF s’est toujours montrée un organisme de confiance et de grande valeur pour le monde universitaire. En plus de son rôle de promulguer la francophonie, elle a su tisser des relations professionnelles et humaines entre les différents établissements universitaires d’un même pays et entre pays de cultures différentes.
- Que pensez-vous du rôle de l’AUF au Moyen-Orient dans l’appui à la recherche ?
L’AUF joue un rôle primordial dans l’appui de la recherche au Moyen-Orient où ce secteur passe souvent au second plan par rapport aux priorités nationales. Ses ambitions de pousser les secteurs publics, privés et universitaires à se croiser sur le chemin de la jeune population, font d’elle un organisme visionnaire exceptionnel.
- Quel avenir à votre recherche et à l’équipe de travail après l’arrêt du soutien de l’AUF ?
Le bilan final de notre projet PCSI est très encourageant. L’étroite collaboration des différents partenaires libanais, français et marocains a été une véritable réussite, tant au point de vue de la complémentarité des travaux de recherche que de leur organisation simultanée. Le projet PCSI a permis de créer un réseau relationnel et professionnel entre les différents partenaires, qui a été traduit par la création d’un noyau de confiance et d’amitié professionnelles répondant aux objectifs de l’AUF. Les trois partenaires ont décidé de poursuivre les travaux sur ce projet ensemble au-delà de ce projet initiateur.
- Un conseil aux étudiants qui hésitent à se lancer dans le domaine de la recherche ?
Un conseil que je donne toujours à mes étudiants : » Suivez vos rêves, ayez confiance en vous et n’abandonnez jamais ce que vous aimez faire », quel que soit les rumeurs à propos de la recherche et de son avenir « .