En dépit des circonstances difficiles que traverse le Liban, l’édition 2021 du concours « Femme francophone entrepreneure » (FFE) connaît déjà un joli succès avec plus de 80 candidatures reçues. La grande finale aura lieu en septembre. Elle marquera le dixième anniversaire de cette compétition célébrant l’engagement des femmes libanaises dans l’innovation et l’entrepreneuriat. En attendant de voir qui sera sacrée « Femme francophone entrepreneure 2021 », nous avons rencontré une ancienne lauréate, Randa Farah, qui a partagé avec enthousiasme son parcours d'entrepreneure riche et varié. Témoignage.
- Vous êtes l’une des lauréates de FFE 2014. Racontez-nous comment avez-vous vécu cette expérience et comment votre projet gagnant « Lebtivity » a évolué et duré ? Et qu’en est-il de votre deuxième entreprise « I have learned academy » ?
Ce fut un grand bonheur et encouragement de gagner le prix de Femme Francophone Entrepreneur en 2014, 2 ans après le lancement en 2021 de http://Lebtivity.com (un calendrier social qui répertorie tous les évènements au Liban en permettant aux organisateurs d’ajouter eux-mêmes des évènements sur la plate-forme par un simple « clic ») en 2012. L’expérience était superbe et encourageante, et je tiens toujours au prix et au titre de gagnante depuis !
Le fait de gagner le prix a donné un boost à Lebtivity et notre image de marque.
Ma 2ème initiative « I Have Learned Academy » a été lancée en 2018 dans le but de discuter tout ce qu’on a pas appris à l’école ou l’université. De sujets de vie que personne ne nous a enseignés plus tôt et qu’on regrette de ne pas avoir appris.
- En quoi devenir entrepreneure a changé votre vie ?
Le fait de devenir entrepreneure est une lame à double tranchant. D’une part, j’ai eu la chance d’utiliser mon potentiel, créativité, temps et énergie à ma guise pour faire une différence dans la vie des autres, mais d’autre part, j’ai connu beaucoup plus d’heures de travail non-stop, parfois tard la nuit, des obstacles et de l’anxiété pour le financement et les frais, surtout la location du bureau, le prix des serveurs et inscriptions internationales à faire en devise forte malgré la crise économique. Et aussi, le risque à prendre, surtout quand on est dans l’événementiel et que l’on doit gérer des crises telle que la pandémie COVID-19, le confinement, la dévaluation de la monnaie au Liban, la crise économique et surtout aussi l’explosion de Beyrouth.
Être toujours en alerte et vivre vraiment tous ces changements demande une double force quand on est entrepreneure.
- Quelles sont les qualités indispensables à une femme d’affaires ?
Une femme d’affaires doit toujours et surtout se rappeler de l’essentiel : qu’elle est une femme. Ce qui veut dire garder sa douceur et sa féminité. Malheureusement, beaucoup de femmes d’affaires deviennent plutôt masculines, et oublient d’équilibrer ces deux côtés. La détermination, la discipline, être créative et flexible, avoir de l’intelligence émotionnelle et savoir / vouloir se développer sont des qualités et ressources à avoir, à faire croître et à savoir garder.
- Investir au Liban dans le contexte de crise actuelle vous fait-il peur ?
Question difficile car c’est un conflit entre cœur et raison… mais oui ça me fait peur. La crise au Liban est une des pires crises au monde, et on vit dans une incertitude continue concernant le futur proche et lointain. Le taux du dollar change chaque jour ce qui ne rend pas les choses faciles. Je sais qu’on est toujours résilients, on aime notre pays et on veut croire en un demain meilleur. Cependant la peur existe et le futur est inconnu et inquiétant…
- Qui vous inspire parmi les femmes entrepreneures libanaises ?
J’ai un peu de mal à trouver vraiment de grands noms de femmes entrepreneures … Mais je dirais: Yusr Sabra (Wakilni), Nadine Labaki et Zeina Daccache.
- Un conseil aux femmes qui ont postulé cette année à FFE et aux femmes qui souhaitent se lancer dans l’aventure entrepreneuriale en général ?
Soyez courageuses, soyez vous-même, sachez ce que vous voulez et vos points forts et faibles. Rêvez mais gardez un peu de réalisme ; comprenez qu’être entrepreneure ce n’est pas la vie en rose, mais si vous sentez au fond de vous un énorme enthousiasme et une grande passion pour ce que vous faites, et si vous avez une voix interne qui ne vous lâche pas, et vous avez toutes les compétences et ressources pour le faire, … allez foncez!!