La Fondation Croix-Rouge française s’est associé à la Croix-Rouge canadienne et à la Croix-Rouge haïtienne pour lancer un appel à candidatures pour une bourse de recherche postdoctorale. Il s'agit ainsi d’accompagner la mise en œuvre et le développement du programme " Amélioration des services de soins d’urgence en zone urbaine en Haïti ".
Dates clés
- 9 décembre 2019 : lancement de l’appel
- 31 janvier 2020 : clôture des candidatures
- Février 2020 : sélection puis annonce des résultats
- 1er mars 2020 : début des recherches
- 1er mars 2021 : rendu des livrables
Montant : 17 000 €
Pour candidater
Thématique de recherche
Contexte et enjeux
En Haïti, une des nations les plus vulnérables aux catastrophes naturelles et aux tremblements de terre, les insuffisances structurelles qui limitent l’accès aux services de base et augmentent la vulnérabilité chronique des populations sont exacerbées par la profonde faiblesse des institutions de l’État. En 2018, plus de 6 millions d’Haïtiens, soit 59 % de la population, vivent sous le seuil de pauvreté de 2,41 USD par jour.
Le système de santé publique manque de ressources pour répondre aux besoins de santé des citoyens haïtiens. Les dépenses publiques de santé restent parmi les plus faibles du monde, à 2 % du PIB haïtien. Seuls 31 % de la population haïtienne ont accès aux soins de santé, en raison de la pénurie de professionnels de santé (il y a actuellement 1 médecin et 1,8 infirmière pour 10 000 habitants), du manque de médicaments et de matériel médical.
Les infrastructures routières sont rares et précaires, limitant l’accès des populations aux services de santé. Le manque de sécurité routière est un problème constant et les accidents sont souvent particulièrement meurtriers en raison du manque de services d’urgence fonctionnels. Ceux qui ont besoin de soins d’urgence à Port-au-Prince attendent souvent des heures avant l’arrivée d’une ambulance. La plupart des gens choisissent d’aller directement au centre de santé plutôt que d’appeler une ambulance, en prenant le premier véhicule disponible. Bien que les ambulances puissent potentiellement améliorer l’accès aux services, elles ont des limitations importantes et les ressources nécessaires pour les faire fonctionner sont considérables.
Aussi, l’information nécessaire pour avoir accès aux services de soins n’est pas toujours disponible. Même lorsque les services de santé sont disponibles, les populations ne savent pas toujours quel service consulter, ou comment le consulter.
Dans ce contexte, le rôle de la Croix-Rouge Haïtienne (CRH) est extrêmement important car les volontaires, au plus proche de la population, peuvent diffuser et apporter les informations relatives à la santé dans les communautés, au sein même des ménages, et ainsi éliminer certains des obstacles à l’accès aux renseignements appropriés sur les soins et enjeux sanitaires. Bien qu’ils ne soient pas des professionnels de santé, les volontaires peuvent partager des informations de base indispensables sur l’hygiène, ce qui peut aider à contrôler la propagation des maladies et des épidémies. Les volontaires HRC intervenant notamment dans les situations d’urgence, ils sont aussi des points de contact et d’information importants au sein des communautés pour améliorer les connaissances et l’accès aux services de santé grâce à la fourniture des premiers soins et à la référence aux établissements et services de santé appropriés.
Cela dit, les volontaires HRC n’ont pas nécessairement un accès facile aux informations requises pour fournir des services d’aiguillage pertinents et rapides à leurs communautés. C’est pourquoi, à la demande de la CRH, la Croix-Rouge canadienne (CRC) a travaillé à l’amélioration d’une application mobile créée il y a quelques années par la Fédération Internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR), dans le but de rendre les informations clés plus facilement accessibles aux volontaires de la CRH.
A l’initiative du Centre mondial de préparation aux catastrophes[1], la FICR a en effet développé un programme[2] offrant aux « Sociétés nationales »[3] un accès à deux applications mobiles à l’usage du grand public et spécifiques à chaque pays. L’application « Premiers secours » met à la portée de chacun des conseils d’experts pour gérer la plupart des urgences en matière de secourisme, et l’application « Dangers » fournit des informations et des conseils sur la façon de gérer les catastrophes et autres situations échappant au contrôle humain.
La CRC a l’intention d’enrichir l’application « Premiers secours » pour en faire un outil plus utile pour les volontaires de la CRH, et ainsi développer les capacités de la Croix-Rouge haïtienne en matière de santé dans les situations d’urgence. Précisément, ce projet vise à ajouter un module supplémentaire à l’application destiné d’une part à améliorer les capacités de la Croix Rouge Haïtienne à fournir des services de soins d’urgence incluant les premiers soins, le support psychosocial et l’appui en références pour les cas de violence basée sur le genre, et d’autre part à améliorer l’accès aux services de santé d’urgence et aux mesures de prévention et de contrôle des épidémies pour les hommes et les femmes habitant dans des zones urbaines de Port-au-Prince.
Objectifs et questions
La recherche poursuivra deux objectifs, liés à l’introduction de cette innovation et répondant à la nécessité d’investiguer la bonne manière de l’intégrer au dispositif existant de formation.
Bien que l’application soit une innovation offrant beaucoup de potentiel en tant qu’outil de formation, tout le monde n’a pas accès aux smartphones ni la culture numérique (digital literacy) suffisante pour en profiter convenablement en Haïti. Aussi, cet outil n’est pas destiné à remplacer la formation en présentiel, mais plutôt à la compléter et à servir de ressource sur les informations de base. Ainsi, afin que celui-ci soit le plus adapté au contexte haïtien et s’intègre au mieux aux formations dispensées par le Centre de formation de la CRH situé dans le quartier Croix des prêts à Port-au-Prince, il convient préalablement de bien comprendre le mode de fonctionnement et les méthodes utilisées par ce centre pour le transfert de connaissances envers les personnes formées, dont les volontaires Croix-Rouge. Qui sont les participants à ces formations ? Comment se déroulent-elles ? Quelles sont les méthodes plus appréciées par les participants de ces cours ? Ces méthodes assurent-elles une application ultérieure des connaissances apprises, en premier soins notamment ? Quelles méthodes alternatives permettraient d’atteindre une meilleure application des connaissances fournies en premier soins ?
90 personnes (75 bénévoles et 15 staffs) de la Croix-Rouge haïtienne à Port-au-Prince seront prochainement formées à l’utilisation du nouveau module de l’application « Premiers secours » créé par la Croix-Rouge canadienne. Etudier la façon dont ce nouvel outil est perçu et utilisé par les participants à cette phase d’expérimentation permettrait de mieux en adapter le contenu au contexte haïtien et au profil des volontaires de la CRH. Cela offrira également une opportunité supplémentaire de comprendre les leviers d’usage et de non-usage en Haïti des applications développées par la FICR, à l’instar de précédentes recherches menées sur l’efficacité des applications mobiles en contexte humanitaire[4], y compris en Haïti[5], et sur l’application « Premiers secours »[6]. En effet, bien que ces applications aient été mises en place depuis plusieurs années en Haïti, que leur contenu ait été traduit en créole et que la possession d’un smartphone est plutôt courante[7], leur utilisation n’a pas rencontré le succès escompté. Or, une bonne utilisation de ces applications permettrait de répondre à certains besoins sanitaires du pays de manière efficace et peu onéreuse. Quelle est la perception et l’utilisation de l’application « Premiers secours » et de son nouveau module par les formateurs et personnes formées du Centre de formation de la Croix-Rouge Haïtienne ? Comment les formateurs intègrent-ils cet outil au cours des formations ? Pourquoi l’application est-elle si peu utilisée par les personnes formées par le centre de formation de la Croix-Rouge Haïtienne ? Le contenu de l’application peut être une source de frein. La recherche devra permettre de déterminer si le contenu doit être modifié pour répondre aux problématiques ou pratiques haïtiennes.
[1] Global Disaster Preparedness Center (GDPC), Universal App Program. http://preparecenter.org/activities/universal-app-program
[2] Global Disaster Preparedness Center (GDPC), Universal App Program: First Aid. Frequently Asked Questions. http://preparecenter.org/sites/default/files/universal_app_program_faqs.pdf
[3] Il y a actuellement plus de 190 Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge à travers le monde.
[4] https://www.preparecenter.org/resources/can-mobile-phones-improve-disaster-preparedness
[5] Humanitarian Innovation Fund: Case study –Mobile Technology: Listening to the voice of Haitians, http://www.elrha.org/wp-content/uploads/2015/01/FINAL-141215-Elrha-CaseStudy-MobileTechnology.pdf [14.05.2018]
[6] https://www.preparecenter.org/resources/comparative-review-first-aid-app
[7] Selon un rapport publié par Safitek en 2018, 88% des personnes interrogées possédaient un téléphone mobile, dont 66 % un smartphone avec accès à l’internet dans l’aire métropolitaine de Port-au-Prince.
Zone géographique de recherche
Ces thèmes seront abordés en Haïti.
Les pays ciblés constituent une entrée empirique pour les recherches. Ils ne correspondent en aucun cas aux nationalités d’éligibilité du candidat.
L’accès au terrain sera conditionné par une évaluation précise des risques remise lors de la candidature et mise à jour avant le départ en prenant soin de vérifier au préalable les recommandations du MEAE français.