La deuxième édition des Rencontres de la Fondation Croix-Rouge française, organisée le 25 septembre 2019 à la Cité internationale universitaire de Paris (CIUP), en partenariat avec l’Agence universitaire de la Francophonie en Europe de l'Ouest, a rassemblé de nombreux participants, parmi lesquels des académiques, des opérationnels, des journalistes, des étudiants, des responsables d’ONG et des acteurs du Mouvement Croix-Rouge.
Cette journée scientifique a permis de présenter les résultats des travaux des huit chercheurs soutenus et accompagnés par la Fondation au cours de l’année 2017-2018.
Conformément à l’engagement de la Fondation de diffuser les savoirs créés, leurs recherches, toutes menées en Afrique subsaharienne francophone, ont été mises en perspective au sein de débats conviant chercheurs et opérationnels au cours de trois tables rondes thématiques (sécurité alimentaire, santé, risques climatiques).
La journée s’est déroulée autour de trois thématiques au cœur de l’action humanitaire :
Thème 1 : Sécurité et autonomie alimentaire
- Mme Kelly Poulet, dont le projet s’intitulait : « Autonomie : de l’éthique à la pratique. Le cas de la FONGS-action paysanne au Sénégal »
- Mme Roberta Rubino : « Pour une sécurisation alimentaire durable. Rôle et potentialité des microentreprises dans l’approvisionnement et la transformation agroalimentaire en milieu urbain burkinabè »
- M. Edouard Kouadio Kouassi : « Lutte contre la malnutrition en Côte d’Ivoire : bilan et perspectives d’appropriation des projets WASH et ATPC par les acteurs locaux de Bounkani »
Après avoir ainsi interrogé l’efficacité de l’action humanitaire à l’heure où, selon le dernier rapport de la FAO, le nombre de personnes souffrant de faim dans le monde est en hausse, ils ont ensuite été invités à rejoindre une table-ronde modérée par M. Franck Galtier, chercheur en Économie au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), sur le thème suivant : « Sécurité et autonomie alimentaire : l’éthique humanitaire en question ». Le débat a également été nourri par M. Cyril Lekiefs, référent technique Sécurité alimentaire chez Action Contre la Faim (ACF), qui a rappelé l’importance de l’analyse contextuelle et des comportements dans la mise en place des projets.
Thème 2 : Accès aux soins
- M. Anicet Toily Zran, dont le projet s’intitulait : « Les ONG face aux défaillances du système sanitaire dans le Nord de la Côte d’Ivoire : palliatif ou substituant ? »
- Mme Tantely Voahiriana Andrianantoandro : « Recours aux soins des femmes enceintes et des enfants de moins de 5 ans dans les zones fortement soumises aux aléas climatiques »
- Mme Roseline Gbocho : « Accompagnement de la fin de vie des enfants en Côte d’Ivoire : le care saisi sous l’angle du don »
De même, après avoir questionné les conditions de réussite des actions destinées à surmonter les obstacles au recours aux soins, ils ont ensuite rejoint la table ronde modérée par le Dr Louis Pizarro, directeur de l’ONG Solthis, autour de la question suivante « Quelle action concertée et intégrée pour surmonter les obstacles au recours aux soins ? ».
Leurs conclusions ont suscité un débat animé au sein d’un panel rassemblant le Dr Khoudia Sow, médecin et anthropologue sénégalaise et Mme Sophie Zaccaria, responsable du plaidoyer chez Médecins du Monde (MdM). Cette dernière a rappelé que MdM avait été la première ONG à recruter une chercheure anthropologue à temps complet.
Thème 3 : Risques climatiques
Les deux derniers chercheurs ont présenté leurs travaux sur la place des représentations des risques climatiques, au-delà du contexte socioculturel dans la conduite des actions de prévention et de gestion.
- M. Georges Djohy, avec un projet sur les « Configurations et dynamiques de l’aide humanitaire dans les zones d’inondations de la vallée du fleuve Niger au Nord-Bénin »
- Mme Mariama Nouhou Koucha : « Evaluation économique des dispositifs de gestion des risques climatiques : le cas du risque sécheresse
Cette place des perceptions locales dans la prévention et la gestion des risques, qu’ils ont mise en avant en présentant leurs conclusions, a par la suite été discutée au cours d’une table ronde modérée par Mme Anne-Cécile Bras, journaliste environnement sur Radio France internationale (RFI).
La question de la prise en compte des risques climatiques par les populations a notamment été abordée par les panelistes Mme Sandrine Revet, chercheure en anthropologie au CERI de Sciences Po Paris, et Mme Thuy-Binh Nguyen, référente technique Réduction des risques de catastrophe à la Croix-Rouge française. Les intervenants ont rappelé qu’il ne suffisait pas que les populations soient conscientes du risque pour changer leurs comportements, comme le démontre la recherche menée par M. Georges Djohy dans les zones inondées du Nord-Bénin.
La journée a été clôturée par le Professeur Jacques Bringer, président du Conseil scientifique de la Fondation. Il a rappelé l’importance de « penser ce que l’on fait » avant de le faire, en citant la philosophe Hannah Arendt. Cette prise de recul pourrait réduire les effets collatéraux d’actions humanitaires qui peuvent à leur insu causer du mal aux populations bénéficiaires. Il a souligné la nécessité de poursuivre les échanges et de favoriser la collaboration entre les mondes de la recherche et de l’action.
Retrouvez le podcast de RFI dédié à ces rencontres : Financer la recherche scientifique pour optimiser l’action humanitaire